Paris (France) : conférence au Collège des Bernardins sur le thème « Jean-Paul II, l’homme du siècle »
Lundi 27 juin 2011 s’est tenue à Paris, au Collège des Bernardins, une conférence sur le thème Jean-Paul II, l’homme du siècle à l’occasion de la publication en français du livre du Professeur Andrea Riccardi intitulé Jean-Paul II - La Biographie.
Autour d’Andrea Riccardi étaient présents Mgr Jérôme Beau, Michel Camdessus, Émile Poulat et le Grand Rabbin René-Samuel Sirat pour une table ronde présidée par Valérie Régnier.
Mgr Jérôme Beau, évêque auxiliaire de Paris, fut le premier intervenant de cette soirée dans le grand auditorium des Bernardins et devant une assemblée nombreuse. Il souligna le sens qu’avait Karol Wojtyla de sa propre vocation, lui qui s’est laissé entraîner par la providence laquelle l’a préservé pour qu’il fasse entrer l’Eglise entière dans le IIIe millénaire. Préservé du nazisme et du communisme mais aussi préservé de la mort lors de l’attentat de 1981. Avec la conscience de cette vocation, Mgr Beau a également abordé deux autres traits de la personnalité du pape : d’une part son souci de toujours s’adresser à l’homme blessé et racheté tel que la foi le donne à voir et à aimer et d’autre part ce réalisme de la foi capable de libérer tout homme de toute idéologie comme l’a démontré Jean-Paul II tout au long de sa vie.
Michel Camdessus, gouverneur honoraire de la Banque de France a témoigné quant à lui de ses rencontres personnelles avec Jean-Paul II, le « pape conversation », alors qu’il était directeur général du Fonds monétaire international. Lors de l’une de ces rencontres en octobre 1989, moins de vingt jours avant la chute du mur, Jean-Paul II demandait de manière prémonitoire : qu’allons-nous faire de cette liberté retrouvée ? Citant le livre d'Andrea Riccardi, Michel Camdessus témoigna que dans la chronologie des événements, le pape scrutait et vénérait un mystère et croyait que dans l’histoire, tout peut changer. Parmi les moments où Wojtyla changea l’histoire, Michel Camdessus rappela tout particulièrement la rencontre interreligieuse d’Assise en 1986 en soulignant la participation de la Communauté de Sant’Egidio et d’Andrea Riccardi en particulier à cet événement historique avec un grand « H ». À ce dernier il rendit un vibrant hommage ainsi qu’à sa biographie d’où émane selon lui « une sorte de compréhension de l’intérieur qui n’enlève rien à l’objectivité de l’historien ».
Émile Poulat, sociologue et historien, a abordé la figure du pape polonais. Fils du peuple polonais voulait dire fils d’un peuple uni non pas par des frontières – comme la France peut l’être – mais uni par son histoire qui est, en particulier au XXe siècle, l’histoire d’un véritable martyr. Un double martyr par l'Allemagne nazie et par l’Union soviétique au cours duquel, selon Jean-Paul II, la Pologne a failli perdre son âme. Émile Poulat a poursuivi son propos en réfléchissant sur la nature de ce « nationalisme » de Wojtyla, sur la rupture qu’a représenté le pontificat de ce pape pasteur, capable d’affirmer des certitudes inébranlables dans un monde sécularisé, se donnant pour mission première de confirmer ses frères dans leur foi, ses frères polonais comme les autres.
René-Samuel Sirat, Grand Rabbin du Consistoire français, ancien Grand Rabbin de France, a clos ces interventions en livrant un témoignage très personnel et ému sur Jean-Paul II. En particulier, le Grand Rabbin raconta la visite du pape à Jérusalem et sa prière au mur à laquelle il fut l’un des rares juifs à assister. Ce geste, renouvelé depuis par Benoît XVI, le marqua profondément ainsi que tous les juifs. René-Samuel rappela également sa participation à la rencontre pour la paix de la Communauté de Sant’Egidio en 2002 à Lisbonne au cours de laquelle l’expulsion des juifs du Portugal perpétrée cinq cents ans plus tôt fut rappelée et le pardon demandé par l’évêque catholique de Lisbonne. Selon le Grand Rabbin, le pape était convaincu que l’Esprit d’Assise devait se poursuivre.
Andrea Riccardi prit finalement la parole pour remercier les intervenants pour leur lecture de son livre qu’il définit comme une tentative d’insérer Jean-Paul II dans son histoire avec ceci de particulier que, « homo maximus », son humanité est entrée dans l’histoire. Il confia également sa volonté, en écrivant cette biographie, de défendre d’un certain révisionnisme la figure de ce grand personnage qui, avec sa force et sa foi, dérange aujourd’hui dans un monde gris. Selon Andrea Riccardi, Jean-Paul II a assumé l’intuition de Paul VI qui disait : « L’homme contemporain n’accepte pas les maîtres, il veut des témoins ».
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